Le reporter camerounais a remporté le prix AIPS-Afrique du meilleur reportage en presse écrite dans une compétition qui a mobilisé près de 70 candidatures. Il n’en revient pas et rêve encore plus grand dans le métier de reporter sportif.
Quelle a été votre réaction en apprenant que vous êtes le premier lauréat du prix AIPS Afrique en presse écrite dont les résultats ont été rendus publics le 25 janvier 2024 à Abidjan, en marge de la CAN «Côte d’Ivoire 2023»?
Naturellement, un sentiment de fierté lorsque la nouvelle m’est parvenue, puisque je n’avais pas fait le déplacement d’Abidjan pour la cérémonie. Je n’en revenais pas d’être sous les feux de la rampe sur une scène internationale à des milliers de kilomètres de mon pays, alors même que je n’avais pas encore eu une telle reconnaissance pour mon travail dans mon pays depuis ces années. C’est d’ailleurs mon tout premier prix remporté dans ce métier, décerné par des ainés chevronnés qui constituent la crème de la presse sportive africaine. Alors, cela a été une joie débordante pour ma famille et moi.
Sur quel sujet avez-vous travaillé ?
L’article récompensé a été publié il y a un an de cela, en février 2023, par le media belge Equal Times, avec lequel je collabore. Le sujet évoque les conditions socioprofessionnelles difficiles, je dirais même exécrables du métier de footballeur au Cameroun, dans un environnement où le footballeur/footballeuse peine à tirer profit de l’exercice de sa profession. La plupart sont sans contrats de travail, sans salaire, et ne bénéficient d’aucune sécurité sociale, dans un contexte de professionnalisation proclamée de ce sport depuis plus d’une décennie. Les chiffres du Syndicat national des footballeurs camerounais (SYNAFOC) témoignent, à suffire, de l’extrême précarité dans laquelle ils évoluent au sein des clubs. Ces derniers offrent plutôt du bénévolat à leurs employés en lieu et place des rétributions auxquelles ils ont droit, puisque l’Etat et la Fédération Camerounaise de Football mettent la main à la pâte pour payer les salaires.
Pourriez-vous nous situez l’intérêt d’un tel sujet ?
La misère ambiante sus décrite a poussé de nombreux footballeurs et footballeuses à se trouver une seconde activité qui se résume généralement à faire du tâcheron pour tenter de joindre les deux bouts. Vous verrez donc des joueurs au sortir d’une séance d’entraînement, dans des kiosques de paris sportifs, dans des salons de coiffure, au service dans les buvettes ou dans des chantiers de construction, à la recherche de ce que leurs clubs ne leur garantissent pas, ou du moins, pas assez, pour leur permettre de consacrer ce temps à la récupération et à se préparer à faire des performances.
C’est fort de ce constat et, surtout, du cas de la jeune Tracy de Canon Filles que j’ai vu exercer dans un salon de coiffure tous les jours après son retour des entraînements, que je me suis intéressé à la condition socioprofessionnelle du footballeur/footballeuse en contexte camerounais. Mon travail avait pour objectif d’essayer de comprendre comment vivent ces travailleurs dans un pays cinq fois champion d’Afrique et parmi les plus respectés au monde dans le football.
Quelles sont vos ambitions dans la presse sportive ?
J’ai débuté ma carrière de journaliste de sport dans un journal spécialisé, et comme par hasard, c’était L’Actu-Sport, dans lequel je m’exprime aujourd’hui, bien plus que le reporter d’hier, mieux comme lauréat de la première édition du prestigieux “Prix AIPS Afrique”. J’ai développé d’autres compétences entre temps dans d’autres domaines, notamment en économie et sur les sciences environnementales. Mais mon domaine de prédilection reste le sport, pour lequel je rêve de remporter d’autres prix, cette fois-ci à l’échelle mondiale. Je crois que c’est bien possible, à force de travail et de détermination. J’invite ainsi mes pairs de la presse sportive nationale à oser également pour titiller les cimes du monde de la presse sportive car on a du potentiel dans ce domaine dans notre pays.
Enfin, je rêve de voir une presse sportive unie, faisant abstraction des querelles de personnes, pour œuvrer vers une destinée commune, celle de donner de l’éclat au journalisme sportif camerounais dans les sphères internationales. Ceci passe forcément par un engagement personnel de chacun des membres de la corporation, à apprendre de nos devanciers dans le métier avec humilité et modestie, et à faire confiance à ceux qui tiennent le gouvernail de notre association.
PROPOS RECUEILLIS PAR E. G. S.